13 septembre 1914 : percée anglaise à l'Ouest (Missy/Aisne, Bucy le long).
Début de la course à la mer qui sera la prémisse des batailles de Flandres.
La bataille de la Marne est remplacée par celle de l'Aisne. Arrêt du recul des troupes Allemandes. Début de la guerre de positions.
13-16 septembre : les Anglais traversent l'Aisne et consolident les positions acquises malgrés les contre-attaques.
Historique du 35e RI (p.10) : "Le 13, le Régiment s'étant emparé de la ferme de Chapeaumonts se porte sur St-Christophe et Haute-Braye."
Le 13, réveil à 3 heures et demi, nous sommes en réserve de division. Le 44e et le 60e sont en première ligne. L'artillerie commence à tirer et toute la journée c'est un duel qui dure jusqu'à la nuit. Nous nous couchons dans un jardin à Hautebray 45.
45 Hautebraye
Nous touchons des vivres et des hommes venant du dépôt viennent nous renforcer.
Toute la journée la bataille continue et le canon tonne. Nous sommes en réserve mais nous devons nous déplacer sans cesse à cause des obus. Nous progressons peu.
14 septembre 1914 : rétablissement de l'aile droite allemande sur l'Aisne, Joffre ayant stoppé à Sissone la contre-offensive. Les Allemands tiennent les hauteurs de Craonne.
Von Moltke est remplacé par von Falkenhayn.
Historique du 35e RI (p.10) : "Le hameau de Chevillecourt que nous atteignons le 14 marque sur notre route la limite de l'effort sublime qui sauva la France [...]."
La pluie tombe à nouveau et c'est couvert de boue que nous nous levons le matin. Le 13 46a nous gagnons les hauteurs de Hautrèche 46b, à proximité de Hautebray ; toute la journée on entend que l'artillerie. Le soir nous nous retirons à Chevillecourt et nous y couchons.
46a en fait le 14
46b Autrèches
Tout comme hier, nous sommes en réserve et le combat se poursuit accompagné d'une forte cannonade. Plusieurs hommes sont touchés par les obus. Nous venons passer la nuit à Berry à 3 kilomètres au nord de Vic-sur-Aisne 30.
30 le plateau de Berry est situé au nord de Vic-sur-Aisne, au nord ouest de Soissons
JMO du 35e RI (p.17) : " [...] le village de Chevillecourt est cannoné [...]. Une heure après le IIe Btn qui s'était rassemblé sur ses emplacements de combat retourne dans ses cantonnements. [...] Le IIIe Btn laisse successivement trois compagnies (9e, 10e, 11e) en profondeur à la lisière du bois au Nord d'Autrèche."
Mais le 14 47, quel réveil ! Les obus ennemis pleuvent sur le village qui commence à brûler. Nous ne sommes pas longs à nous lever ! Le bataillon va réoccuper ses positions de la veille et nous attendons l'ennemi qui n'avance pas. L'après-midi nous les quittons par venir cantonner à Hautrèche, mais en passant à Chevillecourt, quelle horreur de voir les hommes ainsi fauchés par l'artillerie allemande.
47 sans-doute en réalité le 15
Nous nous dirigeons sur le village de Chevillecourt qui a été pris cette nuit par nos troupes. Des cadavres jonchent les rues.
Nous sommes bombardés toute la journée.
Le village a été pillé par les allemands qui ont tué un paysan qui soignait des blessés français. Nous y passons la nuit durant laquelle nous subissons 2 violentes attaques que nous réussissons à repousser.
16 septembre 1914 : premiers chocs sur toute la ligne de front Soissons, Reims, Châlons, Triaucourt. Falkenhayn retire de Lorraine la 6eArmée du Kromprinz. Ruprecht vers St Quentin.
JMO du 35e RI (p.18) : " [...] les 6e et 8e Cies occupent leurs emplacements des jours précédents entre la route de Wasseins et le t de Massenancourt [...] les 6e et 7e Cies s'efforcent d'atteindre la crête qui leur permettra de tirer sur les tranchées allemandes."
Le 16, l'ennemi recommence à bombarder Chevillecourt et nous y repassons pour retourner à nos emplacements. Les rues sont rouges de sang et une femme est tuée par un éclat d'obus à la tête. Enfin nous arrivons à gagner la crête balayée par les obus à ras du sol. La journée se passe sans combat d'infanterie. Le bataillon reste sur place et pendant la nuit…
Dans la matinée, nous allons prendre les avant-postes à la lisière d'un bois sur le plateau de Massenoncourt. Nous organisons défensivement cette lisière et nous y passons la journée et la nuit. Il pleut et l'on y est pas au mieux.
17 septembre 1914 : Fin de la Bataille de la Marne. Stabilisation du front occidental.
Création de tranchées, fortifications au moyen de lacis de barbelés, de nids de mitrailleuses et de batteries de mortiers.
Création entre l'Oise et la Somme d'une nouvelle 2e Armée (Général de Castelnau : 6e et Armée de l'Est = 160 000 hommes).
…mon escouade assure le service de liaison entre le 35e et le 60e et nous allons reprendre position dans un bois un peu en avant de Chevillecourt. La pluie tombe durant toute la nuit, aussi nous réveillons-nous mouillés et couverts de boue.
Nous sommes relevés dans la matinée par le 60e Régiment d'infanterie. Nous devons nous rendre à Autrèche 31 mais nous recevons l'ordre d'attaquer à nouveau. Notre attaque est accompagnée d'une forte cannonade.
Nous passons la nuit à l'abri d'un rocher entre la ligne ennemie et Autrèche.
31 village détruit à 95%. Un parcours pédagogique a été aménagé "sur les traces du 35e RI" (lien page)
Le 18, nous sommes un peu tranquilles. Nous allons faire la soupe au village. Sur le soir, nous apercevons nettement l'ennemi rassemblé en colonnes sur la route. Nous passons la nuit dans ce bois sous une pluie battante, au bruit irrégulier de quelques coups de feu...
L'offensive se poursuit toute la journée. Nous prenons les avant-postes à 7 heures.
Le soir nous nous postons dans une tranchée. A peine installés, nous sommes attaqués. Une très forte fusillade accompagnée du canon dure une heure environ.
Notre tranchée est mal faite, il pleut toute la nuit et nous sommes complètement gelés.
19 septembre 1914 : combats devant Noyon, Vic/Aisne, Laon.
JMO du 35e RI (p.20) : " Quelques coups de fusil, cannonade nourrie, journée calme."
Le 19 nous le quittons pour retourner sur les hauteurs de Chevillecourt où comme auparavant nous recevons une pluie d'obus. Le soir arrive et le canon cesse de tonner. Nous nous couchons sur place…
Nous occupons toujours la tranchée. Nous sommes tout mouillés et les pieds dans l'eau.
Toute la journée nous recevons des coups de fusils. Le plateau est couvert des morts des attaques précédentes. Il y en a jusque dans notre tranchée.
A la nuit, nous sommes relevés et nous la passons à Autrèches.
20 septembre 1914 : les Allemands tentent de couper la ligne de front.
Historique du 35e RI (p.10) : "Le 20 septembre, au matin, une violente contre-attaque ennemie au cours de laquelle notre 2e bataillon fut cerné, décimé, capturé après une résistance désespérée, établit notre ligne définitive en avant de Haute-Braye. La guerre des tranchées commençait."
Historique du 35e RI (pp.20-21) : "A 4 H du matin vive attaque de l'ennemi sur tout le front. [...] les 9e, 10e et 11e Cies du 35e sont rassemblées au sud d'Autrèches et se retirent sur Hautebraie par les bois à l'ouest de la route d'Autrèches. La journée du 20 septembre a été pénible : au cours de cette journée nous avons perdu le IIe Btn."
Le colonel Mac Mahon écrit : "J'ai interrogé un caporal du IIe Btn qui est revenu avec le Btn Leyraud. [...] il envoya deux hommes de son poste prévenir son Btn de l'attaque. Ce poste appartenait à la 6e Cie (Btn Prost)".
… et le lendemain dimanche 20 septembre nous avons un terrible réveil ; les obus, les balles sifflent avec fureur. Nous nous déployons sur la crête et nous commençons le combat qui devient de plus en plus acharné. L'ennemi approche jusqu'à 20 pas de nous. Comme il est nombreux, il nous est impossible de soutenir le feu ; les hommes près de nous tombent en masse : notre lieutenant et plusieurs de mes amis. A ce moment nous recevons des balles de tous côtés et bientôt, notre bataillon bat en retraite et laisse seule notre compagnie au feu qui ne peut soutenir le combat et se replie à son tour en laissant notre section afin de couvrir sa retraite. L'ennemi est en force et notre section est presque détruite. Nous ne sommes bientôt plus que 12 hommes à la crête, nous cherchons à nous retirer, mais il n'y a plus moyen. L'ennemi nous cerne de tous côtés. A ce moment encore, un de mes camarades tombe à mes côtés. Les Allemands arrivent sur nous et nous sommes forcés de nous rendre : ainsi, le dimanche 20 septembre, près avoir fait 50 jours de campagne, nous sommes faits prisonniers. Quelques heures après, nous apprenons que tout notre bataillon est fait prisonnier 48 au village de Chevillecourt complètement incendié et détruit. Le soir nous sommes conduits à proximité de Hautrèche. Nous passons la nuit dans l'église de Morseny 49, où nous pouvons enfin prendre un bon repos malgré les lieux. J'ai couché au pied de l'harmonium et j'avais comme oreiller un grand livre de messe. Malgré cela j'ai bien dormi.
48 le 2ème bataillon au complet est anéanti, s'étant trouvé isolé et cerné. A ce moment, la guerre a déjà coûté 2 000 hommes hors de combat au 35e RI, soit la moitié de son effectif du 1er août : il en fut récompensé par la cinquième inscription à son drapeau "ALSACE-L'OURCQ 1914". Le régiment restera sur ce front de l'Aisne jusqu'en août 1915
49 Morsain. Nous sommes alors dans le département de l'Aisne
Au matin, avant la levée du jour, un grand combat est engagé sur toute la ligne de front. Les allemands attaquent en masse. Ils réussissent à enfoncer nos lignes.
Nous nous reposons un peu en arrière et reperdons les villages de Chevillecourt et d'Autrèches. Nous avons fait des prisonniers dont des officiers.
Pendant ce combat, j'ai fait une patrouille au cours de laquelle nous avons échangé des coups de feu avec des patrouilles allemandes.
Notre régiment à beaucoup souffert, le 2e bataillon a été fait prisonnier après avoir été encerclé par l'ennemi.
Nous avons infligé de fortes pertes à l'ennemi. Dans notre section il y a un tué, plusieurs blessés et disparus. A mon escouade, 1 disparu et 1 blessé.
Ce jour là, un obus est tombé et éclaté à mes pieds, me bousculant et m'aveuglant, sans me faire de mal.